Extrait du Bulletin des Sciences Technologiques


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Dans le Bulletin des Sciences Technologiques, nous trouvons cette : Histoire Du Télégraphe
(Journ. of Frank Instit. ; T. II, pag. 51.)

« Quoique le télégraphe ne soit bien connu et employé par les modernes que depuis quelques années, il n'est pas d'invention moderne. Il y a des raisons de croire que les Grecs ont employé une espèce de télégraphe. L'incendie de Troie fut certainement connu en Grèce, peu de temps après qu'il eût lieu et avant que personne en fût revenu, ainsi que le prouve une pièce où un garde de nuit descend d'une tour, en Grèce, et dit que depuis dix ans il regarde pour savoir quand Troie serait prise, et qu'il venait de le savoir cette nuit.

Les Chinois, quand ils envoient des courriers sur le grand canal, ou quand quelque grand personnage y voyage, font des feux, d'une journée de chemin à l'autre ; et plusieurs nations barbares font usage de feux allumés sur des montagnes, comme d'un signal d'alarme à la guerre.

Polybe appelle (2 mots grec irupavai pyrisitœ?) les différents instruments employés par les anciens pour communiquer les nouvelles, parce que ces signaux étaient toujours faits avec du feu. D'abord on se servait de torches, mais on ne pouvait donner que

peu de signaux ; il était aisé de faire connaître des événements ordinaires, mais pour une révolte ou d'autres événements imprévus cela était impossible.

Cleoxenus ( d'autres disent Démocrite ) inventa une autre méthode qu'il décrit ainsi : On divise les lettres de l'alphabet ( grec ) en cinq parties, on les divise en cinq colonnes ; celui qui doit donner le signal commence par élever deux torches, que l'on garde élevées jusqu'à ce que le signal ait été répondu. Ces torches ne sont destinées qu'à mettre les deux points en rapport ; elles sont retirées, et celui qui transmet le signal élève à gauche un nombre de torches proportionnel à la colonne dans laquelle il faut lire les lettres ; une pour la1re, 2 pour la 2e, etc. ; ensuite il élève à droite une autre torche pour indiquer la lettre qu'il faut lire. Celui qui transmet le signal a un instrument appelé (mot grec ?), formé de deux tubes disposés de manière qu'en regardant par l'un il ne voit que la droite, et avec l'autre que la gauche de l'antre station. L'appareil doit être entouré d'un mur de dix pieds de circuit et de la hauteur d'un homme, pour que les torches élevées au-dessus éclairent bien les lettres, et que celles qui sont en bas soient entièrement cachées.

Pour communiquer, par exemple, la nouvelle suivante: « Un certain nombre d'auxiliaires, environ

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un cent, ont déserté à l'ennemi, » on commence par réduire la phrase au moindre nombre de lettres possible, comme : « Cent Crétois ont déserté, (en grec). » On la transmet de cette manière : la 1re lettre est K de la 2e colonne, on élève 2 torches sur la gauche pour désigner cette colonne et ensuite 5 à droite pour marquer la lettre K ; puis 4 à gauche pour la lettre p (en grec) qui est de la 4e colonne, et 2 à droite pour désigner la 2e lettre, et ainsi de suite. (Voy. Polyb. lib. X, extrait 7, cap. 2. )

Ce moyen et aucun autre analogue ne paraissent avoir été généralement employés par les anciens, et les modernes ne semblent pas avoir employé de machine, comme télégraphe, jusqu'en 1663, où le marquis de Worcester, dans ses Centuries d'inventions assure avoir découvert un moyen par lequel, à une fenêtre où l'œil peut distinguer le blanc du noir, un homme peut tenir sans bruit un discours avec son correspondant par l'emploi d'un télégraphe si parfait qu'il peut également servir le jour et la nuit, « quand elle serait noire comme de la poix.»

Le Dr Hooke, dont le génie mécanique n'a peut-être pas encore été surpassé, présenta, en 1684, à la Société royale de Londres, un moyen de communiquer à de grandes distances. Ce ne fut cependant qu'à la révolution française, vers la fin de

1793, que M. Chappe, que l'on regarde comme l'inventeur du télégraphe, en fit usage le premier, qu'il connût ou non l'invention de Hooke ou d'Amontons avec laquelle son télégraphe a beaucoup d'analogie.

Tout le monde connaît trop bien la disposition des télégraphes pour qu'on la décrive ici d'après l'auteur de l'article.

La première description du télégraphe fut apportée de Paris à Francfort sur le Mein, par un membre du parlement de Bordeaux qui avait vu celui qui était construit sur la montagne de Belleville. Deux modèles furent exécutés à Francfort et envoyés par M. W. Playfair au duc d'York, et, par ce moyen, le plan et l'alphabet de la machine parvinrent en Angleterre, où l'on fit diverses expériences sur ces appareils dont on construi- sit ensuite une ligne de l'amirauté à la côte. On pourrait en établir pour le commerce, qui, au lieu d'être une dépense, seraient un moyen de revenu. ( Extrait de la mécanique de Grégori. )
(Source : Bulletin des Sciences Technologiques, tome 17, par André Férussac (baron de) - 1831)

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